La politique des Sites en Dordogne

Rédaction DREAL Nouvelle Aquitaine, iconographie DREAL Nouvelle Aquitaine, CAUE 24 et EPCC-PIP

  Une politique de protection et de mise en valeur des paysages

La prise de conscience, à la fois de l’intérêt et de la fragilité des paysages naturels, date du milieu du XIXe siècle. En 1861, pour la première fois en France, était protégé au nom de sa valeur paysagère, à la demande des peintres de l’école de Barbizon, un espace naturel d’un millier d’hectares en forêt de Fontainebleau. Le 2 mai 1930 fut votée, à l’instigation notamment des toutes nouvelles associations de tourisme telles que le Touring Club de France, la loi relative à la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque. Cette loi est maintenant intégrée au Code de l’environnement (articles L341-1 à L341-22).

Champ d’application

Sont susceptibles d’être classés les sites et monuments naturels dont l’intérêt paysager, artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque est exceptionnel et qui méritent à cet égard d’être distingués et rigoureusement protégés.

Objectifs

Le classement est une protection forte qui correspond à la volonté du strict maintien en l’état du site, ce qui n’exclut ni la gestion, ni la valorisation. La gestion des sites classés est définie pour chaque site en fonction de ses caractéristiques, prenant en compte la volonté de concilier progrès, activités traditionnelles et préservation du patrimoine par une politique de concertation avec les acteurs concernés.

Intérêts

Le classement permet de mettre en valeur la qualité et la diversité des paysages. Ce patrimoine qui contribue à la qualité de la vie est aussi aujourd’hui un indéniable atout de promotion touristique qui joue un rôle positif dans le moteur économique local.

Quelques chiffres

En Dordogne, on compte 29 sites classés, 141 sites inscrits et deux zones de protection (dispositions prévues par la loi de 1930 mais peu utilisées et non reprises dans le code de l’environnement).
Les sites classés représentent 1,4 % de la superficie du département de la Dordogne et les sites inscrits 3.7 %. Ces chiffres sont à comparer à la moyenne nationale qui est de 1.4% pour les sites classés et de 2.6% pour les sites inscrits.
Pour en savoir +

  L’histoire des sites en Dordogne

L’allée de tilleuls qui accompagne le château de Puyguilhem à Villars, premier site classé dans le département en 1931

L’évolution générale de la notion de sites et de la politique des sites a une traduction concrète dans le département de la Dordogne avec des spécificités qui évoquent les particularités de ce territoire et de son patrimoine.
Le premier site classé de la Dordogne est une allée d’arbres, l’allée de tilleuls qui accompagne le château de Puyguilhem à Villars, protégée le 23 octobre 1931.











Jusqu’aux années 1950, des protections ponctuelles

Jusqu’aux années 1950, la politique des sites est marquée par des protections ponctuelles qui correspondent bien à la notion de sites de l’époque : des chapelles (celle de Limeuil, église et cimetière de Cause-Clérans, église de St Cyr les Champagnes…), des rochers et falaises (rochers de Rocheyrel, falaises des Eyzies…), des châteaux (château de Chaban, de Losse, de Fages…) dont la Dordogne est riche, et les premières protections par inscription de villages. Pour certains, l’inscription au titre des sites est intervenue avant leur reconnaissance par la protection des Monuments historiques (Salignac-Eyvignes, Terrasson…) et a aujourd’hui été relayée par des Sites Patrimoniaux Remarquables (ex-AVAP).
L’année 1944 est une année particulièrement féconde pour la politique des sites : 30 des 183 protections du réseau des sites ont été instaurées en 1944, et cela sans compter les sites qui ont été depuis abrogés par des arrêtés plus récents suite à des extensions de périmètre de protection. Cela s’explique par le recrutement pendant la guerre d’inspecteurs des sites pour la mise en œuvre de la loi de 1930. Les protections de l’année 1944 ont porté pour beaucoup sur le patrimoine des châteaux et falaises de la vallée de la Vézère avec un seul classement, celui du château de Losse et ses abords. Ces nombreuses protections ont servi par la suite à asseoir des protections plus étendues ou bien renforcées par des classements.

Les années 60 : des ensembles urbains et paysagers

Dans les années 60, l’effort porta sur des ensembles urbains (Monpazier, centre ancien de Sarlat, Périgueux), quelques parcs de châteaux (Lacoste, Marqueyssac…). De grands ensembles paysagers commencèrent à être protégés à partir de 1965 : les sites de la vallée de la Vézère, de la vallée de la Dordogne, les sites inscrits des cingles de Limeuil et Trémolat.

Site classé du Parc du château de Marqueyssac

Les années 70 : une politique de protection ambitieuse

Les années 1970 constituent la décennie qui a vu le plus de protections se mettre en place : 54 des 183 protections du réseau des sites de la Dordogne. La politique des sites inscrits généralisés se poursuit avec la vallée de l’Enéa, la vallée de la Dronne, la vallée du Rieu-Nègre. Des projets concernaient également la vallée de l’Auvézère, le territoire de la Double jusqu’ici ignorés des protections au titre des sites. Ils ne purent tous se concrétiser et furent substitués par une politique de protections plus ponctuelles devant à l’époque préparer l’instauration de sites inscrits plus ambitieux :

L’inspecteur régional des sites, M. Rougier, en 1975 expliquait la protection du bourg de Ste Eulalie d’Ans situé dans la vallée de l’Auvézère de la manière suivante : « Depuis plusieurs années, notre administration se préoccupe de protéger la vallée de l’Auvézère, site de grande qualité et ce, avec l’appui d’une association qui s’inquiète des menaces qui pèsent sur ce secteur fort intéressant. Une protection généralisée de la vallée, portant sur plus de quarante communes, a été lancée. Elle traîne. Aussi ai-je envisagé de réaliser des protections ponctuelles qui serviront de bases pour inscrire, plus tard, l’ensemble du site »

Des villages aux abords de Périgueux furent également protégés au titre des sites pour pallier les risques engendrés par une « urbanisation galopante », et pour veiller à la qualité de la restauration du bâti ancien. Ce fut le cas du bourg de St-Pierre-de-Chignac dont la protection fut demandée par la commune. L’inspecteur régional des sites justifiait ainsi l’inscription : « la protection permettra de concourir au rétablissement de toitures et façades et de maintenir la place centrale dans son état actuel ». Les sites d’Annesse et Beaulieu, de Mensignac furent quant à eux protégés dans le cadre d’un recensement des sites ruraux du département de la Dordogne qui mit en avant leur qualité et les menaces que la proximité de Périgueux représentait.

Site inscrit du château de Maupas et ses abords
Site inscrit de la Vallée de l’Enéa

Les années 80 : une protection des bourgs ruraux et des sites préhistoriques

Site inscrit du village de Belvès

Les années 1980 sont marquées par la poursuite de l’inscription de villages et bourgs ruraux (St-Aquilin dans la Double, St Martial-de-Nabirat, Daglan…), par des extensions de site inscrits de bourgs (extension du site inscrit de la bastide de Monpazier…), et surtout par le classement de plusieurs grottes et gisements préhistoriques. Les grottes et gisements préhistoriques ont pour la plupart été protégés au titre des Monuments historiques rapidement après leur découverte. Dans les années 1980, la politique des sites vient renforcer les protections des monuments historiques en classant les terrains qui surplombent et entourent la grotte ou le gisement. Furent ainsi classés la grotte de la Mouthe et ses abords, la colline de Lascaux, les grottes de Font de Gaume et Combarelles… C’est un outil encore utilisé aujourd’hui, la législation des sites vient protéger des espaces, des paysages vastes indissociables d’un patrimoine ponctuel dont ils forment l’écrin. Dans les années 2010, la grotte de Cussac et la grotte de Maxange ont ainsi été classés.



Les années 90 : une protection de sites de grande ampleur

A partir des années 1990, l’accent est mis sur le classement de grands ensembles paysagers : la vallée de la Dronne et le vallon de Merlande et en 2001, l’inscription du site des coteaux de Saint-Germain-de-Belvès, le renforcement du classement du Roc Branlant et ses abords à Saint-Estèphe, site classé initialement en 1935.

Site classé du Roc Branlant
Site inscrit de St-Germain-de-Belvès
Site classé de la vallée de la Dronne
Site classé du Vallon de Merlande
Site classé du Cingle de Trémolat
Site inscrit du bourg de Saint-Privat

Années 2000 – 2015 : ZOOM sur deux SITES CLASSES

Site classé de la Cussac et ses abords (décret du 25 mars 2013)

Découverte en 2000, la grotte de Cussac peut être considérée par son importance comme un « Lascaux de la gravure ». Cussac contient non seulement des gravures pariétales exceptionnelles inspirées du bestiaire traditionnel du monde paléolithique (mammouths, rhinocéros, cervidés, bisons et chevaux, ainsi que des oiseaux et des silhouettes humaines), mais également des restes humains remarquablement conservés. La zone d’influence hydrogéologique et géomorphologiques a été prise comme référence aux limites du classement. Elle correspond au secteur dans lequel la combinaison des phénomènes de ruissellement, d’infiltration et de circulation des eaux souterraines peut avoir un impact sur la bonne conservation de la grotte. En effet, l’eau est le vecteur majeur de pollutions dans ce type de cavité se développant dans les massifs calcaires au système karstique complexe, et il était donc nécessaire de définir la zone en surplomb de la grotte pouvant influencer la qualité de l’eau mais également le régime d’alimentation en eau de la grotte.
Les paysages des abords de la grotte de Cussac sont constitués d’une part de la vallée étroite du Belingou ponctuée de moulins et d’autre part, en surplomb par les plateaux du sud du Périgord, entre Périgord Noir et Bergeracois, où le relief ondule, support d’une alternance de bois et clairières agricoles souvent occupées en leur centre par l’habitat traditionnel.

Paysages des abords de la grotte
Les sites de la vallée de la Vézère

En Vallée de la Vézère, l’objectif de révision des périmètres de Sites, dont les premiers classements datent des années 1930, mené en étroite collaboration avec les collectivités et acteurs locaux était de protéger le paysage culturel, écrin du Bien Inscrit en 1979 au Patrimoine Mondial de l’UNESCO « sites Préhistoriques et Grottes ornées de la Vallée de la Vézère », dont le plus connu est sans conteste la grotte de Lascaux. Cette richesse fantastique est cependant invisible à l’œil d’un visiteur non averti. Elle est inséparable des abris sous roche et des pieds de falaises en encorbellement dont les spécimens les plus remarquables se retrouvent dans le territoire de ce Site. Il convenait donc de se doter d’une protection à la hauteur des enjeux patrimoniaux paysagers (la vallée) et historiques (ses éléments archéologiques). Englobant les éléments et les paysages les plus emblématiques de la vallée, les limites de ce Site ont été posées de façon à répondre aux exigences de la protection patrimoniale et à contribuer à la mise en valeur des paysages.
Cette démarche a abouti en 2015 avec des périmètres de Sites classés et inscrit révisés :
• Un site classé alliant paysages et patrimoine culturel composé de 3 entités (décret du 11 décembre 2015 – 11 500 hectares – 18 communes) :
– le site classé de la « Vallée de la Vézère et de sa confluence avec les Beunes »,
– le site classé de la « Ferrassie »,
– le site classé de la « grotte de Rouffignac ».)
• Le site inscrit Vallée de la Vézère, enveloppe du site classé (Arrêté ministériel du 28 juillet 2016 – 16 609 ha – 29 communes)
Il accompagne le classement du cœur de vallée sur son pourtour et assure ainsi la transition vers un territoire plus vaste. Il permet d’assurer une veille architecturale et paysagère sur les abords immédiats du Site classé.

Falaise sur la Vézère
Château de Commarque
Château de Miremont



  Le bilan des sites classés et inscrits en Dordogne et les enjeux de préservation

En croisant les différentes unités de paysage de l’atlas et la localisation des sites protégés de la Dordogne, on constate que les protections illustrent la richesse et la diversité des paysages périgourdins, les protections étant réparties sur l’ensemble du territoire.

La Double et le Landais

Site du Parcot (Echourgnac, La Jemaye), maison traditionnelle à « bolet » ; Site du domaine de Lavalade à Saint-Aulaye ; Vallée du Rieu-Négre (Parcoul et La Roche-Chalais) ; Étangs et leurs abords à La Jemaye ; Bords de la Dronne à Saint-Aulaye.
Sites inscrits dans le Landais : la bastide de Villefranche-de-Lonchat et ses abords ; le parc et le château de Montpeyroux.

Le Périgord Limousin

Les sites protégés se situent essentiellement dans le Pays de Piégut :
- Sites classés : Grand étang, Roc Branlant et ses abords à Saint-Estèphe
- Sites inscrits : l’église et ses abords à St-Cyr-les-Champagnes, le Château de Leygurat à Augignac, le bourg à St-Barthélemy-de-Bussière, l’étang de Grolhier sur les communes de Busserolles, Champniers-et-Reilhac et Piegut-Pluviers, le site des Forges à Javerlhac-et-la-Chapelle-St-Robert.
Le patrimoine industriel est particulièrement riche : le circuit de découverte du patrimoine industriel lié aux ressources naturelles (eau, sol, bois) des vallées de l’Isle et de I’Auvézère en témoigne.

Le Bergeracois

Sites inscrits dans le Bergeracois : Ancien cimetière à St-Pierre-d’Eyraud, l’église, l’ancien cimetière et ses abords à Cause-de-Clérans, la bastide d’Eymet, le bourg d’Issigeac, le château de Grateloup et ses abords à St-Sauveur, les quartiers anciens de Bergerac, le site de la Catte à Bergerac, le site de Perrou à Gageac-et-Rouillac.
Les Marges du Bassin de Brive
Le principal site protégé concerne le château de Hautefort et son bourg (sites inscrits) qui forment un ensemble remarquable et le repère fort du pays. Plus au sud, se trouve également le site inscrit du Château de Peyraux et ses abords (Le-Lardin-St-Lazare).

La Vallée de l’Isle

Plusieurs sites inscrits sont présents dans la vallée, autour de châteaux et de leur parc comme à Neuvic-sur-l’Isle, Château de Fratteau à Neuvic-sur-l’Isle au Château de Longua à St-Médard-de-Mussidan, au Château des Fournils à St-Laurent des Hommes, Château de Maupas et ses abords à Sourzac.
Les autres sites concernent des enclaves encore rurales autour de villages préservés de l’urbanisation : église St-Pierre-et-Paul et ses abords à Sourzac, lieu-dits (Annesse-Nord, Beaulieu-Nord, Beaulieu-Sud) à Annesse-et-Beaulieu, site du Brouillaud - hameau rural à St-Astier.

Le Ribéracois

Le Ribéracois possède deux sites classés autour du cimetière de Cercles et du camp néolithique du Gros Bost à St-Méard-de-Dronne.
Plusieurs sites inscrits sont également présents dans le Ribéracois autour de bourgs (Lusignac, de Montagrier, de St-Privat-des-Prés), de fermes et hameaux (site de la Beauvière à Ribérac, site du Sourbier à Cherval et Gout-Rossignol, site de la Rivière à Allemans, Riberac, Villetoureix) et de l’allée d’arbres de Villetoureix.

Le Périgord Central

Le Périgord Central est riche d’un patrimoine rural et urbain présent dans de nombreuses communes. Les protections au titre des sites classés ou inscrits couvrent ainsi de nombreux châteaux et manoirs : Château de Puyguilhem, Châteaux de Montréal et de Maupas à Issac, Château de Lardimalie et son parc à St-Pierre-de-Chignac, Château de Lauterie et ses abords au Change, Château de la Roche-Pontissac à St-Front-d’Alemps, maison de maître de la Grange à Montagnac-la-Crempse, maison de maître de Lachèze à Chourgnac, maison forte de Lâge à Négrondes.
Plusieurs centre anciens de villes et de bourgs sont protégés au titre des sites et couverts par un SPR (ex-ZPPAUP - ex-AVAP) : à Périgueux, Nontron, Excideuil, Brantôme, Bourdeilles. Enfin des sites villageois sont également protégés : hameau des Andrivaux à Chancelade, villages du Change, de St-Jean-de-Côle, de St-Pierre-de-Chignac, Château, église et abords à St-Jory-les-Jabloux, entrée du bourg de Mensignac, bourgs de Ste-Eulalie-d’Ans, de La-Chapelle-Gonaguet, de St-Raphaël, St-Maime-de-Pereyrol.
Dans la vallée de la Dronne, plusieurs sites classés et inscrits couvrent la vallée entre Brantôme et Bourdeilles : Bois de la Garenne à Brantôme, Rochers de Rocherel à Grand-Brassac, Site classé et inscrit de la Vallée de la Dronne sur les communes de Bourdeilles, Valeuil, Brantôme.

Le Périgord Noir

La concentration sur le Périgord Noir des sites inscrits et classés est proportionnelle à la densité du patrimoine que recèle cette unité. La reconnaissance du Périgord Noir est d’abord liée à ses deux vallées principales, Dordogne et Vézère. Cette reconnaissance est internationale, grâce au patrimoine exceptionnel, dont les sites préhistoriques et grottes ornées de la vallée de la Vézère, inscrites sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.
De nombreux sites classés et inscrits couvrent les paysages emblématiques des deux vallées : sites classés de la vallée de la Vézère et de sa confluence avec les Beunes, de la Ferrassie, de la grotte de Rouffignac, cingles de Limeuil et de Trémolat, bourg de Pontours, Grotte de Cussac, et le site inscrit de la Vallée de la Vézère qui accompagne le cœur de Vallée classée.
En dehors des deux vallées, les sites classés et inscrits sont également nombreux : Vallée de l’Enea, centre ancien de Sarlat, bourgs de St-Avit-Sénieur, de Biron, de Belvès, de Montferrand-du-Périgord, de Daglan, de St-Martial-de-Nabirat, de Salignac, de St-Amand-de-Coly, de Bourniquel, bastides de Monpazier, de Villefranche-du-Périgord, Cabanes de pierre du Breuil à St-André-d’Allas…

Voir aussi