Les enjeux paysagers liés à la forêt

La forêt occupe 45 % du territoire de la Dordogne. Le taux de boisement dépasse même les 50 % dans La Double et le Landais ou dans le Périgord Noir. Hormis dans le Bergeracois et le Ribéracois, partout dans le département des bois sont omniprésents. La propriété forestière reste extrêmement morcelée, avec de nombreux taillis et peu de renouvellement des futaies. La surface forestière est toujours en augmentation, les boisements progressant à mesure que l’agriculture délaisse les prairies pentues et les sols trop maigres ou trop secs, ce qui confère à de nombreux secteurs du département une impression de fermeture paysagère. La gestion forestière sur les versants les plus exposés et la qualité des lisières le long des routes ou des clairières sont des enjeux paysagers importants.

  Valoriser la présence et les nuances des boisements et des lisières

Paradoxalement, dans le département de la Dordogne, la présence de l’arbre est importante mais reste peu évidente à caractériser. Les bois constituent la toile de fond des paysages, contribuant à un paysage composite, alternant ouvertures et fermetures avec les espaces agricoles. La forêt n’est que rarement un ensemble constitué, sauf par exemple au sud avec celle la Bessède. Loin des grandes futaies ou de massifs reconnus, gérés et organisés, la forêt périgourdine est morcelée entre une multitude de propriétaires dont la gestion dissociée influe sur la perception des paysages. Dans ce contexte des points de vigilance sont à évoquer pour que les boisements forment un atout du paysage. Tout d’abord les lisières, qui constituent les premiers plans et la majeure partie des perceptions, méritent d’être variées et entretenues pour garder un certain attrait et des transparences notamment le long des routes. Puis les modes de gestion, donc d’exploitation, ont un impact visuel (futaie jardinée ou coupe à blanc, maintien d’une strate arborée choisie…). L’arbre peut aussi par sa présence animer la forêt : arbres âgés isolés ou bordant une parcelle exploitée, ou encore arbre remarquable ponctuant le parcours. Dans un contexte climatique en pleine évolution, les taillis de châtaigniers dépérissent par endroits. Le choix des essences et la proportion entre feuillus et conifères méritent une réflexion et peuvent transformer radicalement un paysage. La question de l’accès public sur ces propriétés privées est également un enjeu fort pour l’attractivité des paysages. Certains sites mériteraient également d’avoir une gestion des boisements appropriée pour les révéler ou en conserver leurs qualités paysagères.

Pistes d’actions envisageables :
- Proposer des plans de gestion respectueux de l’environnement et cohérents entre eux sur un vaste périmètre (plan simple de gestion concerté).
- Limiter les coupes à blanc. Préserver des arbres et des bosquets afin d’amoindrir l’impact visuel de la coupe et d’assouplir la forme de la parcelle exploitée. Favoriser une gestion forestière en futaie jardinée, qui maintient une couverture forestière permanente.
- Eviter les microboisements ou les plantations monospécifiques de conifères.
- Préserver des espaces dégagés autour des villages et des hameaux.
- Maintenir des lisières forestières de qualité le long des chemins et des routes. Privilégier les boisements mixtes ou feuillus sur les lisières les plus visibles. Eviter de planter uniquement des conifères en lisière. Eclaircir les lisières pour favoriser la perméabilité visuelle vers le sous-bois.
- Prévoir une gestion différenciée de la lisière : augmenter la fréquence de l’élagage et des éclaircies des premiers rangs. Préserver et mettre en valeur des arbres remarquables.
- Maintenir un réseau de chemins publics pour desservir les parcelles et une fréquentation du territoire par les habitants et les touristes.
- Conserver un réseau de chemins suffisants, balisés et entretenus. Créer des points d’arrêts aménagés simplement pour s’arrêter.
- Maintenir un compromis entre propriété privée et accès public aux forêts.
- Mettre en valeur les évènements le long des voies forestières (passage de rivière, entrée dans une clairière, suivre un muret…).




  Veiller à la gestion des versants forestiers des vallées et des peupleraies

Dans les vallées, le système de vue change. Les vues en belvédère, les covisibilités entre les versants ou encore les ouvertures du couloir du fond de la vallée rendent beaucoup plus prégnant la présence des versants boisés et des peupleraies. Il est donc important de réfléchir la gestion forestière à une échelle plus large compte tenu de son impact visuel. Une vigilance s’impose concernant la gestion forestière des coteaux pour leur conserver une certaine continuité et une harmonie. Ainsi tout aspect artificiel donné par des formes géométriques calées sur les limites parcellaires ou encore générées par des lignes de plantations verticales est à éviter. Il en est de même pour les « patchworks » de parcelles alternant conifères et feuillus. Les modes de gestion peuvent avoir un impact fort dans les vallées. Les effets des coupes à blanc demeurent plusieurs années avant que la croissance des arbres ne cicatrise vraiment les versants. La gestion des boisements devrait aussi participer à favoriser la lecture du paysage en ménageant des vues depuis les coteaux. Un équilibre est à trouver pour que les boisements ne cachent pas les éléments essentiels des sites emblématiques dans les grandes vallées (situation en promontoire d’un château, falaises rocheuses, ouverture d’une confluence…). Dans les fonds, il est important que les peupleraies évitent de trop cloisonner ou de refermer la vallée.

Quelques pistes d’actions envisageables :
- Planter et gérer en tenant compte des formes générales du paysage et du relief. Ne pas pratiquer les coupes de régénération sur des surfaces géométriques calées sur le parcellaire : privilégier des plages d’intervention plus larges que hautes dont les formes s’accordent mieux avec celles des versants.
- Raisonner le plan de régénération à une échelle suffisante. Eviter les trop petites parcelles qui créent un effet de mitage du versant.
- Etre vigilent sur les effets paysagers de la gestion forestière des crêtes.
- Privilégier les peuplements de feuillus et les peuplements mixtes sur les versants les plus exposés visuellement.
- Limiter les coupes à blancs et les boisements monospécifiques. Préserver des arbres et des bosquets afin d’amoindrir l’impact visuel de la coupe et d’assouplir la forme de la parcelle exploitée. Favoriser une gestion forestière en futaie jardinée, qui maintient une couverture forestière permanente.
- Gérer les boisements pour conserver et mettre en valeur les vues sur la vallée depuis les hauts et notamment sur les cours d’eau.
- Mettre en scène les situations particulières (falaises, verrous rocheux, confluences, village en belvédère) en limitant la végétation pour les rendre visibles.
- Limiter la descente des boisements vers le fond de vallée.
- Réfléchir le développement des peupleraies vis-à-vis de l’échelle du vallon ou de la vallée, au regard de leur impact visuel.
- Ne pas planter de peupleraie dans certains sites sensibles : confluences, villages belvédères. Fractionner les peupleraies pour éviter les effets d’écran continu.




  Bibliographie paysage et forêt

Plaquettes

- La prise en compte du paysage en gestion forestière – CNPF, 2010

Guides et charte

- La charte forestière du PNR Périgord-Limousin, 2018
- Règles de la gestion forestière durable - Exigences pour la France métropolitaine – PEFC, 2016
- Guide paysager de la forêt limousine – CRPF-ONF, 2002

Voir aussi