Panorama de Campagne

A Campagne, au cœur du Périgord Noir, le belvédère offre une vue dégagée sur la vallée de la Vézère. Au dessus du hameau le Séchoir, la vallée sinueuse de la Vézère révéle la diversité de ces paysages.

Rédaction et iconographie CAUE 24

Panorama de Campagne

  Lecture de paysages

Le Périgord Noir est un concentré de patrimoine historique, naturel et préhistorique. Le belvédère où nous nous trouvons est implanté sur le rebord du coteau Sud de la vallée de la Vézère sur la commune de Campagne. Après avoir parcouru la forêt du château de Campagne, un spectaculaire point de vue s’ouvre à nous en direction Nord vers les méandres et les coteaux du Bugue.
Le caractère singulier de ce paysage résulte d’une rivière qui a creusé son sillage dans un calcaire du crétacé plus ou moins tendre. Les amplitudes topographiques varient de 60 m à 190 m d’altitude et offrent de nombreuses vues profondes et étonnantes. Cette topographie est marquée par la vallée large et sinueuse de la Vézère. Elle s’urbanise de plus en plus sur les terres fertiles par les extensions récentes du Bugue. Le fond de vallée et les coteaux sont ponctués par ces nouvelles habitations qui recherchent un point de vue exceptionnel.

Au premier plan, le fond de vallée est dominé par de la polyculture- élevage avec une dominante de prairies. Dans les coteaux très boisés ponctués de truffières, s’établissent des fermes dans de petites clairières. Les haies, les peupliers d’Italie, la ripisylve de la Vézère, les noyeraies et un habitat traditionnel agricole constituent un échantillon représentatif du paysage traditionnel de la vallée Vézère.
Au deuxième plan, nous distinguons une urbanisation en fond de vallée qui se développe en agglomérant les anciennes fermes et les petits hameaux. Grâce aux ponts franchissant la rivière Vézère, le Bugue est un lieu de passage, depuis le Moyen Age, entre Campagne et Limeuil. Cette cité commerciale s’est d’autant plus développée que le chemin de fer est arrivé en 1863 (ligne Périgueux-Sarlat) et que les infrastructures routières se sont améliorées. Les bois constituent l’arrière plan de ce panorama. Au plus loin que notre regard se porte, les masses sombres des bois maillent le paysage.

  Le paysage d’hier

Extrait cadastre Napoléonien 1818 de Campagne, Archives Départementales de la Dordogne
Extrait cadastre Napoléonien 1817 du Bugue, Archives Départementales de la Dordogne

Campagne et le Bugue Le Bugue en pied de coteau ne s’était pas beaucoup développé en fond de vallée pour préserver les terres fertiles. Mais l’arrivée du chemin de fer a diversifié les activités en fond de vallée, ce qui a bouleversé le paysage : entreprises, commerces et habitat se sont déployés jusqu’à une colonisation des pavillons sur les coteaux offrant des vues spectaculaires.

Quelques indices en fond de vallée témoignent d’un paysage certainement différent avant l’Ere Industrielle et la Seconde Guerre Mondiale. Les peupliers d’Italie élancés qui ponctuent le fond de vallée étaient régulièrement plantés dans le but d’obtenir des poutres de longue portée utilisées dans la construction des fermes. Le lieu-dit le Séchoir et son bâtiment caractéristique, nous rappelle que la culture du tabac était présente dans ces fonds de vallée presque durant toute la première moitié du XXe siècle. Enfin, les haies de plus en plus résiduelles formaient les enclos des bêtes mais servaient également à réguler l’eau de la rivière lors des inondations. Les barrages en amont n’étaient pas encore construits.
Sur les coteaux, la forêt était certainement moins dense voir inexistantes car pâturée par des ovins. Les points de vue sur la vallée étaient très nombreux ! Cette activité ayant complètement disparue, les falaises sont de plus en plus camouflées par la densité végétale.
Les truffières, qui ont fait la fortune de nombreux agriculteurs en Périgord ont été développées également sur des petites parcelles au début du XXe siècle. Actuellement, elles sont plantées comme des vergers sur des grandes parcelles.

  L’évolution des paysages

Le plus grand changement visible est la fermeture des paysages.
Le boisement des coteaux étant de moins en moins exploité et le pâturage ayant disparu, les bois de chênes et de pins couvrent toutes les pentes abruptes et peu mécanisables.
La difficulté réside également dans la complexité du morcellement foncier et la multitude de propriétaires, ce qui n’aident pas à une bonne gestion de la forêt. Les points de vue sur la vallée sont de plus en plus restreints et les falaises, emblèmes de la Vézère, sont aujourd’hui à peine visibles.
Les noyeraies, activité agricole actuellement économiquement intéressante, tendent à fermer les fonds de vallée. Il est important de soutenir une activité agricole diversifiée et à petite échelle pour conserver le côté pittoresque de ces lieux et favoriser la biodiversité.

La diffusion de l’habitat récent, dans la vallée et les coteaux, a également profondément marqué le paysage. Couleurs des façades, de la toiture, chemin d’accès ou encore clôture sont autant d’éléments qui ont un impact dans le grand paysage. Certes, des documents d’urbanisme et des protections encadrent cette évolution, mais l’équilibre entre les espaces naturels, agricoles et bâtis reste fragile.

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